mardi 25 décembre 2012

Graffiti Louis


Louis s’intéresse aux graffitis depuis l’âge de 5 ans. D’où? Aucune idée. À 5 ans, Louis était fasciné par les graffitis et par les caricatures de Serge Chapleau. Chapleau a vite pris le bord. Un jour, je lui ai envoyé une photo de mon fils, assis dans sa chambre, les murs tapissés de ses caricatures. J’espérais une rencontre de mon fils et de son idole. Pas de réponse. Les caricatures ont pris le bord de la poubelle. Les vrais bums ne font pas de caricatures dans La Presse.

À l’école primaire, des flos impressionnés par les trouvailles de Louis embarquaient dans son trip, jusqu’à ce que leurs parents capotent. Univers underground, caché, noir et illégal. C’est justement ce qui fascinait et fascine toujours Louis. Les copains changeaient d’idée, mais pas Louis. Un jour, des jeunes ont dessiné des graffitis à l’école. La directrice, pas très intelligente, a aussitôt condamné Louis à une semaine de travaux communautaires. Je n’ai jamais aimé cette femme, trop pressée à mettre le couvercle sur la pression, sans savoir d’où venait le feu. Louis n’est pas un pyromane, idiote.

Il n’est pas évident de gérer le talent d’un jeune à l’école primaire, surtout quand sa passion n’est ni le hockey ni le soccer. Un jour, j’ai offert à Louis nos poubelles pour qu’il les peigne. Durant deux ans, nous avons eu les poubelles les plus funky de la rue.

Avec le temps, la passion de mon fils ne s’est pas démentie. Il rentrait souvent à 5 heures du matin, après avoir passé la nuit sous des ponts à dessiner, explorer ou photographier. Comme le graffiti est un art omerta, j’ai mis du temps à m’en rendre compte. À 5h du mat, on sent généralement l’alcool. Louis sentait l’air frais.

La bilbiothèque de Louis est remplie de livres de graffitis du monde entier. L’ordi contient des gigs de photos de graffitis de Montréal et d’ailleurs. Par la force des choses, cet art est constamment renouvelé; le même lieu est souvent témoin d’oeuvres nouvelles. Il n’est pas un recoin de la ville que mon fils n’ait protographié.

Louis a 23 ans, dont 18 de graffitis.

La semaine dernière, ma fille Stéphanie est allée chez Yavana, un copain de l’école primaire. Yavana est infographiste graffiteur. D’origine cambodgienne, ses dessins couvrent des murs dans plusieurs pays. De fil en aiguille, il lui montre une toile que Louis aime beaucoup. Ce matin, Stéphanie l’a offerte à Louis pour Noël. Ému, le garçon? Il n’aura pas assez de la journée pour s’en remettre. J’ai appris la base du graffiti de Michel, a dit Yavana à Stéphanie. Et Michel a tout appris de Louis. En termes artistiques, à 23 ans, Louis est déjà grand-père, il a deux générations après lui.

Je n’aime pas Noël, fête obligée du faux. Mais ce matin, le cadeau n’a rien à voir avec le commerce. C’est celui d’un garçon qui reçoit tout l’amour de sa soeur.


lundi 24 décembre 2012

e

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Avez-vous déjà mis 20 minutes pour lire trois e-mails ? Moi, souvent, en lisant e.
e est une nouvelle, écrite par Matt Beaumont, en 2000. Ça a l'air vieux, mais quand c'est la première fois, c'est neuf.
Dans l'univers de la pub, une agence prépare un pitch pour Coke; 346 pages, que des e mails, entre les 3 janvier et 7 février 2000.
La dernière fois que j'ai autant ri, c'était en écoutant Planes, Trains and Automobiles, avec Steve Martin et John Candy.
Plié en quatre.
Un maudit bon film.


jeudi 6 décembre 2012

La fleur et le LEGO

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Ma fille me demande c’est quoi le conflit du Moyen-Orient. Pourquoi les Palestiniens? Gaza? Pourquoi Israël? Je fouille. L’Holocauste, la Terre promise, la Guerre des Six jours, le traité de paix Égypte-Israël, l’Iran, Arafat, les morts, les territoires occupés, les morts, Sharon, les colonies, les morts et les morts, le Hamas, Israël et ses F-18, les Palestiniens et leurs lance-pierres, le Mossad, Five broken cameras. C’est gros. En même temps, c’est petit. L’Homme surtout est petit, il n’en finit plus de ne pas régler ses problèmes.

Les problèmes du Moyen-Orient, c’est l’histoire de la haine. Ce sont des gens qui se détestent dans ce qu’il y a de plus profond, la terre natale. Ils feront tout pour arracher un seul pouce carré à l’autre. Et là, ils crieront victoire, comme à la garderie.

La haine fait les hommes se comporter en bébés lala. Maman, il a pris mon Lego, je veux mon Lego! Non, je veux mon Lego, là. Donne-moi mon Legoooooo! Et là, ça crie, ça se tape dessus et ça hurle. On parle d’un insignifiant bloc de plastic rouge, un pouce carré. On parle d’enfants et pourtant, un arracherait la tête à l’autre pour se l'approprier.

Dans les stratégies de guerre, le topo est toujours le même. L’ennemi est un sous-produit de la merde, un moins que rien, un animal, un rat et ainsi de suite. Il faut l’exterminer, le détruire, le tuer, sinon c’est lui qui le fera. Les juifs, les tziganes et les homosexuels vus par les Allemands. Les Chinois vus par les Japonais. Et les Japonais vus par les Chinois, et les Américains vus par les Vietnamiens. Et les Vietnamiens et les Français et les Anglais et les Tutsis et les Arméniens et les Hindous et les Amérindiens, la liste est longue. Au Moyen-Orient, on tue pour mettre la main sur le pouce carré de l’autre. Il faut dire qu’au Moyen-Orient, la tradition remonte à loin. Il y a plus de 2000 ans, le gars qui a voulu enseigner l’amour a fini sur une croix. On repassera pour l’exemple.

La haine au cinéma, c’est Voisins, le film d’animation de Norman McLaren. Deux voisins se battent à mort pour posséder une fleur. Une fleur, ça pousse sur un pouce carré. La récompense de cette haine, idiote, faut-il le dire, c’est un Oscar à Hollywood. Comme quoi l’enseignement de Voisins a fait long feu.

La haine dans ma cour, c’est justement mon ex-voisin. Un vieux, 140 ans. Il n’a pas aimé le ballon de mon fils de six ans sur son terrain. Il l’a confisqué et l’a balancé dans la cour de l’autre voisin, pour ne pas que mon fils le retrouve. Bébé lala. Même sa femme n’a pu le raisonner. Déclenche-t-on une guerre à cause d’un ballon? On l’a déjà fait pour moins que ça.

Dans la jungle et les océans, le plus gros bouffe le plus petit et le plus rusé se farcit le nono. Le lion aime la biche dans son assiette et le requin raffole du phoque salé. Sans le savoir, ces animaux participent à l’équilibre de la nature. Seul l’homme désiquilibré est assez bête pour exterminer ses semblables et les autres.

La mère menace les enfants. Ceux-ci obéissent, pas convaincus. Dès qu’elle a le dos tourné, garde-le, ton maudit Lego, il est même pas beau. Menteur. À force de piquer des Lego et de les assembler, on en vient à bâtir des maisons et même, des colonies.

Il y a un seul hic: les fleurs ne poussent pas sur les Lego.